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Question de M. Pierre-Antoine Levi (Tarn-et-Garonne - UC) publiée le 25/04/2024

M. Pierre-Antoine Levi attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les impacts de la loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement, sur la Guyane française.
Cette législation, qui interdit la recherche et l'exploitation des hydrocarbures sur l'ensemble du territoire national, affecte particulièrement la Guyane, une région où le potentiel en ressources naturelles est significatif.
Tandis que les pays voisins tels que le Guyana et le Suriname bénéficient économiquement de l'exploitation pétrolière, la Guyane française se trouve dans une situation de désavantage compétitif notable.
Cette disparité soulève des questions cruciales de justice et d'équité pour les habitants de la Guyane, qui observent les bénéfices économiques de leurs voisins tout en étant contraints par une législation nationale qui limite leur propre développement économique.
Dans ce contexte, il est légitime de s'interroger sur la pertinence actuelle de cette interdiction, surtout au vu des opportunités économiques émergentes dans la région.
Il est donc impératif de reconsidérer notre approche, en évaluant toutes les options disponibles qui permettraient de concilier le développement économique et la préservation des écosystèmes uniques de la Guyane.
Il lui demande ainsi si une révision de cette loi pourrait être envisagée, afin de permettre une exploration prudente mais déterminée des ressources naturelles de la Guyane, permettant à cette région de jouer un rôle actif et bénéfique dans le développement de l'espace amazonien.
Il sollicite sa position sur la possibilité d'ajuster la législation en vigueur pour mieux refléter les réalités et les besoins spécifiques de la Guyane française tout en respectant les engagements environnementaux de la France.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du numérique publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, auteur de la question n° 1256, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie.

M. Pierre-Antoine Levi. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, au seuil d'une ère nouvelle marquée par l'euphorie pétrolière chez nos voisins du Guyana et du Suriname, une interrogation capitale se pose pour notre territoire de la Guyane française.

Alors que la prospérité bat à notre porte, nous restons, par un choix mystérieusement volontaire, en marge de cette richesse potentielle. Il est singulier, voire troublant, de constater que tandis que nos voisins se préparent à récolter les fruits d'un eldorado noir, la Guyane française ne semble pas avoir choisi cette option.

N'est-il pas paradoxal, madame la secrétaire d'État, que la nature ait distribué ses faveurs avec tant de générosité autour de nous et que seul notre territoire semble exempt de cette manne ? Cette situation interroge : sommes-nous face à une absence réelle de ressources ou plutôt à une volonté délibérée de ne pas explorer, de ne pas chercher ? Il apparaît comme une incongruité géologique que la Guyane soit la seule terre vierge de cet or noir dans une région en pleine effervescence extractive.

Ce choix - si c'en est un - de ne pas engager notre territoire dans la course à l'exploitation pétrolière mérite d'être scruté avec la plus grande attention. Il soulève une question de justice et d'équité pour les Guyanais, qui observent, impuissants, leurs voisins s'enrichir.

Comment expliquer à nos concitoyens que nous restons les bras croisés alors que, potentiellement, des richesses sommeillent sous nos pieds ? En omettant volontairement de rechercher ou d'exploiter d'éventuelles ressources pétrolières en Guyane, ne sommes-nous pas en train de condamner notre territoire à l'isolement économique ?

Quelle ironie ce serait que de voir un jour le Guyana, enrichi par ses hydrocarbures, venir en aide à la Guyane française, oubliée de la prospérité pétrolière.

Madame la secrétaire d'État, ne pensez-vous pas qu'il soit temps de reconsidérer notre position, d'évaluer toutes les options disponibles pour assurer le développement durable de la Guyane, dans le respect de ses écosystèmes uniques, mais aussi de ses besoins économiques pressants ?

Ne serait-il pas sage de revisiter la loi de 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement, dite loi Hulot, dans ce contexte nouveau ? Ne faudrait-il pas explorer, avec prudence, mais détermination, les possibilités offertes à notre territoire ? La Guyane doit-elle rester un spectateur désabusé du miracle économique à ses portes, ou peut-elle - doit-elle - jouer un rôle actif dans le nouveau chapitre qui s'écrit dans la région amazonienne ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Marina Ferrari, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur Levi, la France s'est engagée, dans le cadre de l'accord de Paris, à maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 à 2 degrés.

Le rapport des scientifiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) indique que, pour atteindre cet objectif, l'essentiel des réserves d'hydrocarbures déjà identifiées à l'échelle planétaire devra rester dans le sous-sol, et qu'il est nécessaire de ne plus entreprendre de nouvelles explorations. C'est pourquoi la France s'est engagée, par la loi dite Hulot de 2017, à interdire la délivrance de nouveaux permis de recherches d'hydrocarbures et à ramener à 2040 la date de fin des concessions existantes.

La France a renforcé son engagement dans l'accord de Paris lors de la transmission de l'objectif européen de réduction de 55 % des émissions d'ici à 2030 à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Une révision de la loi du 30 décembre 2017 pour permettre une exploration des ressources pétrolières de la Guyane n'est donc pas possible si nous voulons respecter les engagements environnementaux que nous avons pris. L'interdiction d'exploration introduite par cette loi garde sa pertinence sur la totalité du territoire national.

Par ailleurs, la politique menée par la France vise une réduction importante de la part des hydrocarbures dans notre mix énergétique d'ici à 2045. L'exploration aujourd'hui n'aboutissant à une production d'hydrocarbures que dans dix ou quinze ans, cette production d'hydrocarbures ne trouverait probablement pas de débouchés commerciaux significatifs sur le marché français.

L'État demeure en revanche pleinement favorable, monsieur le sénateur, dans les limites des engagements internationaux pris par la France, à une exploration et à une exploitation déterminée des ressources naturelles minières de la Guyane, au service du développement économique du territoire.

Le projet de loi de simplification de la vie économique comprendra d'ailleurs des dispositions de simplification de l'exploration minière sur l'ensemble du territoire national, ainsi que des dispositions spécifiques aux autorisations minières les plus utilisées en Guyane, pour faciliter l'exploitation minière dans ce territoire au sous-sol très riche.

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