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Question de M. Jean-François Longeot (Doubs - UC) publiée le 28/12/2023

M. Jean-François Longeot appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire au sujet de la compatibilité entre les aides relatives à la politique agricole commune et le développement de l'agrivoltaïsme.

La chambre haute a récemment travaillé sur un cadre législatif novateur pour l'agrivoltaïsme, initialement à travers une proposition de loi dédiée à ce sujet puis ultérieurement par l'intégration de cette dernière dans le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables.

Un problème récurrent soulevé par les agriculteurs est l'incapacité à bénéficier des aides de la politique agricole commune lorsqu'ils mettent en oeuvre des activités agrivoltaïques sur leurs parcelles. Il semble que l'arrêté du 13 mai 2023 relatif aux définitions transversales liées à l'activité et aux surfaces agricoles pose des difficultés, en particulier dans la rédaction de son article 8, entravant ainsi l'intégration efficace de l'agrivoltaïsme dans le calcul des aides de la politique agricole commune (PAC).

Le critère exigeant que 30 % d'une parcelle soient recouverts par des panneaux photovoltaïques constitue un obstacle pour les agriculteurs qui souhaitent parfois protéger une surface plus importante de leurs parcelles du soleil à certaines saisons. De plus, l'arrêté dispose que « cet usage occasionnel non agricole doit être limité dans le temps », sans pour autant préciser de durée maximale. De même, il est mentionné que « l'usage non agricole doit intervenir après la récolte », ce qui semble incompatible avec la présence de panneaux photovoltaïques sur des parcelles cultivées.

Dans ce contexte, il souhaite recueillir son avis sur la possibilité de prendre un arrêté modificatif afin de mieux refléter la réalité de l'agrivoltaïsme tel qu'il se développe en France. De nombreuses voix parmi les agriculteurs réclament une meilleure compatibilité entre les aides de la politique agricole commune et ces activités non-agricoles, alignées sur la situation observée chez la plupart de nos voisins européens.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 08/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, auteur de la question n° 999, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Jean-François Longeot. Madame la ministre, ma question est simple : je souhaite porter à votre attention la problématique cruciale pour nos agriculteurs de la compatibilité entre les aides de la politique agricole commune (PAC) et le développement de l'agrivoltaïsme - un dossier que vous connaissez bien.

Vous le savez, ce sujet me tient particulièrement à coeur. De l'eau a coulé sous les ponts depuis la proposition de résolution tendant au développement de l'agrivoltaïsme en France, que j'avais déposée avec mon collègue Jean-Pierre Moga il y a deux ans : le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables a été adopté, ce qui a permis de hâter le développement de l'agrivoltaïsme.

Notre chambre a instauré un cadre législatif novateur pour promouvoir cette forme d'agriculture durable. Malheureusement, des obstacles persistent, notamment en raison de l'arrêté du 13 mai 2023 relatif aux conditions d'éligibilité à la PAC, qui pose des difficultés majeures, en particulier du fait de la rédaction de son article 8.

Ce texte impose des critères stricts, notamment celui selon lequel 30 % d'une parcelle au maximum doivent être recouverts par des panneaux photovoltaïques, ce qui entrave la liberté des agriculteurs, lesquels cherchent parfois à équiper une plus grande surface de leurs terres. Cela n'a aucun sens d'admettre l'éligibilité à la PAC des surfaces couvertes à 28 % par des panneaux, mais pas celle des surfaces couvertes à 50 % !

De plus, les dispositions selon lesquelles l'usage non agricole doit être limité dans le temps et intervenir après la récolte ne correspondent pas à la réalité de l'agrivoltaïsme, tel qu'il se développe en France. Il est évident que les agriculteurs ne vont pas ôter leurs panneaux avant la récolte et les réinstaller quelques semaines après.

Face à cette situation ubuesque, je vous interpelle sur la possibilité de prendre un arrêté modificatif, afin d'ajuster ces critères et de mieux refléter la réalité de l'agrivoltaïsme. Les agriculteurs français réclament une meilleure compatibilité entre les aides de la PAC et ces activités non agricoles. Cette demande est, je crois, en accord avec les pratiques observées chez nos voisins.

Il est crucial que nous soutenions pleinement le développement de l'agrivoltaïsme en France, non seulement pour sa contribution à la transition énergétique, mais aussi pour sa capacité à promouvoir une agriculture plus durable et résiliente.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Longeot, la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi APER, à la rédaction de laquelle vous avez fortement contribué, fixe un cadre clair et opérationnel pour l'agrivoltaïsme.

Je le rappelle, l'agrivoltaïsme, tel qu'il est défini par la loi française, vise les installations photovoltaïques sur terre agricole exploitée, dont la fonction première est d'apporter un bénéfice à l'exploitation agricole - amélioration des rendements ou de la qualité agronomique, protection contre des aléas climatiques tels que la grêle, économies d'eau, amélioration du bien-être animal, etc.

Dans ces conditions, il n'y a pas d'opposition entre production énergétique et production agricole, cette dernière étant systématiquement privilégiée.

La loi APER indique explicitement que la présence d'une installation agrivoltaïque ne fait pas obstacle à l'éligibilité du terrain agricole au versement des aides de la PAC.

Vous avez raison de le souligner, plusieurs évolutions réglementaires sont nécessaires, dont la modification de l'arrêté définissant les conditions d'éligibilité aux aides de la PAC. Il s'agit en particulier de ne pas soumettre les projets effectivement reconnus en agrivoltaïsme à la limite du taux de 30 % de couverture que vous rappelez.

S'agissant d'agrivoltaïsme, une limite de 40 % de taux de couverture a été introduite, sur la base des éléments scientifiques actuellement disponibles. Mais je rappelle que la démonstration du bénéfice agronomique est le principal critère et peut exiger, selon les situations, de s'en tenir à des taux de couverture moindres.

Pour les projets en service qui répondraient à la définition de l'agrivoltaïsme, une visite par les services de l'État devra être menée rapidement, afin de confirmer le maintien de l'activité agricole et de permettre le versement des aides de la PAC.

En revanche, les installations photovoltaïques au sol sur terrain agricole, qui ne sont pas agrivoltaïques dès lors qu'elles ne permettent pas le maintien strict de l'activité agricole, continueront à être soumises au régime actuel. Vous le savez, il est désormais interdit de mettre des installations photovoltaïques au sol sur des terres agricoles exploitées.

En conclusion, je vous confirme qu'un arrêté modificatif est en cours de préparation et qu'il sera signé dans les prochaines semaines, pour ajuster la situation au cas spécifique de l'agrivoltaïsme sur terrain agricole.

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