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Question de Mme Marion Canalès (Puy-de-Dôme - SER) publiée le 08/02/2024

Question posée en séance publique le 07/02/2024

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marion Canalès. « La France n'est pas assez riche de ses enfants pour en négliger un seul. » Telle était, monsieur le Premier ministre, la première phrase du texte signé par le général de Gaulle à la Libération.

Entre 2017 et 2019, il n'y a pas eu de ministre chargé de la protection de l'enfance et voilà des semaines que nous attendons la composition définitive du Gouvernement.

Il a fallu une succession de drames pour que le Président de la République se rende compte, en 2019, que la protection de l'enfance exigeait un pilotage politique.

De la même façon, vous avez attendu, monsieur le Premier ministre, qu'un autre drame humain se déroule dans mon département, le Puy-de-Dôme, avec le suicide d'une enfant placée âgée d'à peine 15 ans, pour prendre enfin les décrets d'application d'une loi votée voilà deux ans. Ce fut fait hier soir, à la hâte : l'encre n'est pas encore sèche et leurs contours nous sont toujours inconnus.

Face à l'inertie de votre gouvernement, les inquiétudes et colères, légitimes, se multiplient ; vous devez les entendre.

Aurons-nous, demain, un ministre de l'enfance et de la protection de l'enfance, un ministre doté des moyens financiers pour engager, enfin, ce plan Marshall de la protection de l'enfance qui est plus qu'urgent, avec tous les acteurs concernés, et pour « désinvisibiliser » ces 350 000 enfants placés et les professionnels qui les accompagnent sans relâche ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST. - Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

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Réponse du Ministère du travail, de la santé et des solidarités publiée le 08/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/02/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités. Je vous remercie, madame la sénatrice Canalès, d'avoir rappelé la mémoire de cette jeune fille, en ce jour qui marque précisément le deuxième anniversaire de la loi, dite Taquet, relative à la protection des enfants.

Il restait à prendre, c'est vrai, un certain nombre de décrets d'application. Le Premier ministre, entré en fonction voilà trois semaines, a signé celui que vous évoquiez. (Marques d'ironie sur les travées du groupe SER.)

Mme Laurence Rossignol. Parce qu'avant ce n'était pas la même majorité ? Il y a eu une alternance ?

M. Hussein Bourgi. Il a fallu deux ans !

M. Rachid Temal. Enfin !

Mme Catherine Vautrin, ministre. Ce décret, nous le savons, est très important puisqu'il permet d'interdire concrètement le placement d'enfants dans des établissements commerciaux. Il convient de le souligner, tant ces enfants, confiés à l'aide sociale à l'enfance, mesdames, messieurs les sénateurs, sont ceux qui ont le plus besoin d'être accompagnés.

Je me permets de le rappeler, l'esprit de la loi Taquet était précisément de favoriser la parole de ces enfants, de leur permettre d'être écoutés. Beaucoup en ont parlé, cette majorité l'a fait. Elle apporte aujourd'hui des réponses, même si celles-ci sont toujours trop longues à venir quand il est question d'enfants.

Je voudrais en outre souligner le travail que nous menons avec les départements. Ce sont eux qui, au quotidien, sont aux côtés des professionnels, des enfants. Les départements ne manquent pas de nous interpeller parce que nous devons regarder la situation avec lucidité. Après le covid-19, les violences intrafamiliales ont augmenté. (M. Yannick Jadot acquiesce.) Elles appellent des réponses. C'est le sens de notre engagement. C'est aussi le sens du projet de loi de finances pour 2024, qui a permis de prévoir un accompagnement financier en la matière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, regardons les progrès accomplis, mesurons le chemin qui reste à parcourir et mobilisons-nous ensemble. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. - Mme Denise Saint-Pé applaudit également.)

Mme Laurence Rossignol. Qu'avez-vous à dire sur la nomination du ministre ? C'était la question !

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.

Mme Marion Canalès. Il vous reste vingt-quatre heures pour décider si, oui ou non, il y aura un ministère de l'enfance et de la protection de l'enfance. (Mme Laurence Rossignol renchérit.)

La protection de l'enfance devait être l'enjeu du quinquennat : depuis, rien.

Rien lors de votre déclaration de politique générale, monsieur le Premier ministre.

Rien pour les 350 000 enfants placés, dont 10 000 bébés, certains atteints du syndrome de l'hospitalisme.

Rien pour la santé mentale de ces enfants, qui perdraient vingt ans d'espérance de vie et font trente-sept fois plus de dépressions et de tentatives de suicide.

Rien sur la reconnaissance de l'utilité sociale des professions de la protection de l'enfance.

Rien pour les départements en première ligne et qui font face à un resserrement de leurs finances.

Le propre de la puissance est de protéger, écrivait pourtant Blaise Pascal. Votre gouvernement semble toujours plus prompt à réprimer qu'à protéger. J'en veux pour preuve que les décrets d'application relatifs au code de la justice pénale des mineurs ont, eux, été pris en trois mois, quand il a fallu attendre deux ans pour ceux qui concernent la protection de l'enfance.

M. Patrick Kanner. Bravo !

Mme Marion Canalès. Combien faudra-t-il encore de drames avant de tenir la promesse de faire de la protection de l'enfance une priorité et d'y consacrer un vrai ministère ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes GEST et Les Républicains. - M. Philippe Grosvalet applaudit également.)

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